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Gaël Derive : « Le changement climatique va perturber notre économie »

Le 29 janvier 2015 par Bruno Veillon

Climatologue, Gaël Derive s’est rendu dans les rizières, sur la banquise, … pour rapporter des témoignages qui démontrent que le dérèglement climatique est déjà une réalité dans le quotidien de nombreuses personnes. Un film à découvrir à Épinal.

Il y a plein de façons de sensibiliser aux menaces du réchauffement climatique. Vous avez choisi de réaliser un film ‘Une planète & une civilisation’ et d’écrire un livre. Pourquoi ?

Gaël Derive – Le dérèglement climatique n’est pas qu’une question de chiffres de températures, mais de la modification des conditions de vie de 7 milliards d’habitants de la planète. L’idée, c’est de sortir d’une vision purement écologique du problème, où l’on ne parlerait que de l’ours polaire sur sa banquise ou de la submersion des atolls. On est très loin de ça dans ce film. Je souhaite toucher aux besoins fondamentaux des hommes : l’agriculture, l’alimentation ou l’eau potable. J’ai rencontré six familles sous six climats différents : en très haute altitude, dans le froid ou la chaleur… Et je leur ai demandé s’ils observaient des changements climatiques et comment cela les concernait.

Quels sont ces changements auxquels ils sont confrontés ?

Par exemple, Nipa, une jeune femme au Bangladesh, constate qu’il y a des inondations de plus en plus fréquentes qui perturbent la récolte du riz. Or, le riz est son aliment essentiel, qu’elle mange matin, midi et soir. Sa famille en consomme 800 kilos par an.

C’est encore plus sensible chez Satu en Éthiopie. Pour lui, en raison de la hausse des températures de 1,3°C en 40 ans il y a très peu de précipitations. Il ne mange qu’une fois par jour. Les sécheresses sont plus fortes et plus fréquentes. Chez Jeannie en Arctique, la banquise s’est formée trois semaines après la date habituelle. Cela impacte directement la pêche.

Karakaua sur son île du Pacifique, constate que l’eau est plus salée qu’avant, que les lentilles d’eau douce aussi. Ce qu’il mange et boit change de goût ! Ces constats simples permettent de confronter les données scientifiques aux témoignages des personnes.

Ces personnes subissent le dérèglement climatique de plein fouet. Comprennent-ils qu’ils sont en quelque sorte les “victimes” de nos modes de vie occidentaux ?

Sur place, ils ont une vision très pragmatique des choses. Ils constatent qu’il se passe quelque chose, mais ne savent pas d’où cela provient. Ils n’ont souvent pas la télé, la radio ou une éducation pour comprendre.

Chez nous, dans nos sociétés occidentales, nous prenons nos voitures pour aller au travail, nous envoyons des gaz dans l’atmosphère et in fine, c’est chez eux à des milliers de kilomètres de là, que le climat est bouleversé. Ils n’ont pas conscience de ce qu’est ce changement climatique global.

Ces problèmes concernent-ils l’Europe ?

Bien sûr. D’une part, nous habitons dans un monde globalisé, ouvert. Ce qui se passe à un endroit de la planète a des répercussions partout ailleurs. On annonce en France une hausse des températures de 4 à 5°C, ce qui va perturber tout notre système économique. On ne pourra plus cultiver les mêmes plantes aux mêmes endroits et aux mêmes périodes. Ça va aussi modifier le tourisme, l’industrie, les transports. Nous devons prendre conscience à quel point notre mode de vie est lié aux conditions climatiques.

Vous écrivez : ” Il faut se saisir de cette crise comme d’une chance pour construire des modèles économiques et sociaux qui nous permettront de “prospérer sans croissance.” ” L’humanité peut-elle réellement changer ou est-ce une utopie ?

Un changement est possible, mais nos élus sont encore formatés sur les modèles économiques du XXe siècle. Il va falloir expliquer que la croissance telle qu’on la connaît aujourd’hui n’est plus tenable. On pense vivre dans un monde aux ressources infinies alors que notre planète a ses limites. Faire comprendre cela, c’est le combat du siècle. En France, il faut qu’on réduise nos émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050.

Qui doit réagir ?

C’est à nous, pays du Nord, d’agir très rapidement. La COP-21 arrive (Conférence mondiale sur le climat à Paris en 2015), c’est une période essentielle : 195 pays doivent accepter de réduire drastiquement leurs émissions de gaz à effets de serre. Il va falloir que la société civile s’empare de cette question, qui devrait être une priorité absolue. Dans ce cadre j’organise une tournée avec l’ADEME baptisée ” Le climat et vous ? “, pour projeter mon film et ouvrir le débat.

Épinal accueillera donc le premier rendez-vous de cette tournée de 54 dates ?

Oui, au salon Planète et Énergies on projettera la version courte du film pour comprendre ce qu’on peut faire maintenant à Épinal et dans les Vosges pour se mobiliser. Il faut tout faire pour protéger la fragilité de notre planète.  À l’échelle de l’univers, la vie n’est pas la norme, mais l’exception. Rien n’est figé, rien n’est acquis.

Samedi 31 janvier 2015 à 17 h
Au Salon Planète et Énergies à Épinal
Pré-inscription nécessaire sur www.planete-et-energies.fr

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