Fabricants de vélo : la griffe vosgienne
Reconnues pour leurs créations originales, trois entreprises vosgiennes conçoivent des deux-roues rivalisant d’ingéniosité. Cadre en bambou, design by Starck, moteur à hydrogène : les projets se démarquent tous les uns des autres.
Rien qu’en France, il s’est vendu 2,9 millions de vélos en 2014, une progression de
7 % ! Le vélo a la cote et les fabricants proposent de plus en plus des modèles qui se démarquent de la concurrence.
Moustache Bikes l’a bien compris en lançant à Golbey son premier modèle de VAE, Vélo à Assistance Électrique, en 2011. ” À l’époque l’offre était assez restreinte, plutôt orientée vers un public sénior. Notre idée était d’ouvrir la pratique VAE à un public plus jeune, avec une offre plus adaptée Il y a eu l’ère de l’automobile, maintenant la mobilité se pense différemment “, analyse Gregory Sand, co-fondateur avec Emmanuel Antonot de l’entreprise vosgienne.
Et ça marche : 8 000 vélos vendus en 2015, 10 000 prévus en 2016, soit une progression de 25 % des ventes. Un succès pour un fabriquant qui revendique son indépendance.
La renommée du VAE golbéen dépasse les frontières de l’hexagone, 40 % de ses vélos s’exportent à travers la planète : en Europe principalement, mais aussi en Australie et en Amérique du Nord, avec une gamme qui s’étend du vélo de ville au modèle adapté au trekking.
” On travaille depuis deux ans avec la Nouvelle-Zélande où 200 vélos par an sont commercialisés “, complète le gérant. Moustache Bikes ne lésine pas sur les moyens pour rester le leader sur le segment premium : maîtrise complète de la chaîne de production, depuis la recherche et développement, jusqu’à la commercialisation des vélos.
Des partenariats avec Bosch et son moteur électrique eBike ou avec le designer PhilippeStarck sont aussi fructueux. ” En cinq ans, nous sommes devenus l’acteur de référence sur le segment premium en France “, complète Grégory Sand. Son chiffre d’affaires de 14,5 millions d’euros montre que la jeune structure pèse déjà lourd dans un marché émergent.
Plus à l’est dans le massif, Cédric Braconnot, fondateur de Labyrinth Bikes à Saint-Maurice-sur-Moselle, a eu aussi la bonne idée : créer un vélo à son image. ” J’étais vététiste confirmé au niveau national. Au départ, j’ai décidé de créer mon prototype de cadre qui a fini par intéresser pas mal de spécialistes. Il y a quelques années, je me suis engouffré un peu trop dans l’aspect compétition, en créant le team Labyrinth qui permettait aux sportifs sous contrat, dont le Déodatien Rémi Thirion, d’utiliser les vélos de la marque pour des manches mondiales “, remarque Cédric Braconnot.
Des vélos qui s’exportent jusqu’en Australie
Aujourd’hui, son entreprise produit des cadres de VTT pour sportifs, mais aussi pour le grand public ” qui veut posséder du beau matériel. Un peu comme les amateurs de belles voitures. ” Quatre produits haut de gamme remplissent le catalogue de la société.
Ce qui a beaucoup occupé le jeune entrepreneur ces derniers mois, c’est sa collaboration avec Pragma Industries autour ” du premier vélo électrique propulsé à l’hydrogène au monde ! L’avantage est que ça ne coûte pas très cher comme énergie : la batterie se recharge en 10 secondes et l’autonomie est proche des 200 km. Labyrinth ne deviendra pas vendeur de ce type de vélo, en tout cas dans un premier temps. Mais je pourrais l’envisager dans les cinq ou dix prochaines années. “
Enfourchons la bicyclette pour rejoindre In’Bô, à soixante kilomètres de là Cette jeune entreprise dirigée par cinq amis, anciens étudiants ingénieurs, développe parmi une gamme d’objets au look tout en bois (lunettes, skate-board ) un étonnant vélo au cadre en bambou et en fibre de lin.
Un produit qui a vite fait ses preuves, puisqu’en 2014, Thibaut Lhenry est devenu champion du monde de fixie en chevauchant cette étrange monture. Un vélo en bois ? Amazing !
Imaginez l’engin : du bambou de la Bambouseraie d’Anduze pour le cadre ” 3,5 fois plus résistant que l’acier ou le carbone “, confirme Aurèle Charlet, l’un des co-fondateurs, ” sans compter sa capacité à absorber les chocs et les vibrations “, de la fibre de lin de Normandie pour les jonctions et des pièces en aluminium made in Vosges, confectionnées par Saint Jean industries à Harol. Chaque vélo est réalisé sur-mesure et assemblé à la main. ” Le fruit d’une longue discussion avec le client pour être sûr de répondre à ses attentes. ”
Des pièces uniques et haut de gamme, qui ont un prix, de 3 000 à 4 000 euros pour le cadre nu, entre 5 000 et 11 000 euros pour un vélo complet. Sur ce marché de niche, la concurrence est faible. Seuls quelques concurrents aux États-Unis viennent talonner la jeune structure encore en Contrat d’Appui au Projet d’Entreprise, qui vend entre 5 à 10 modèles par an et entend standardiser davantage sa gamme en 2016.
Avec des projets innovants plein les cartons, ces trois entreprises vosgiennes détonnent dans le paysage français et européen de la fabrication de vélos. Difficile de savoir sur quels futurs projets totalement fous planchent ces spécialistes. Aucun n’a voulu révéler ses secrets. ” Peur de la concurrence “. C’est aussi ça la griffe vosgienne : ménager le suspens et surprendre.
Le banlieusard inspiré par les Vosges
Lancé en 2009 par Ronan Le Floch, un ancien mécanicien automobile vosgien, Oderen Bike est une société basée à Ville d’Avray en banlieue parisienne. Clin d’oeil à son passé dans les Vosges, l’entrepreneur a baptisé ses vélos et cadres en carbone avec des noms 100 % vosgiens. ” Je me démarque des autres en valorisant les Vosges, ce qui apporte un vrai capital sympathie “, explique le créateur. Pour une meilleure visibilité, le fondateur d’Oderen Bike a décidé de soutenir les meilleurs espoirs nationaux du VTT, comme le Romarimontain Hugo Huillié. ” J’ai eu le privilège de soutenir de futures stars, telles que Julian Alaphilippe : champion de France espoir 2012 et qui a réalisé une très belle saison 2015 “, déclare-t-il, entendant poursuivre sa progression sur le marché, dans l’Est de la France.
