Rêve général ! : sur les planches, des valeurs

À Mirecourt depuis 2008, la compagnie Rêve général ! répond à une demande : écrire, diffuser des spectacles et participer à une médiation culturelle auprès du territoire vosgien. Une initiative qui a remporté le Grand Prix Vosegus.
” On se demande tous ce qui unit la société, ce qui nous rassemble… Je suis persuadée que les séances communes, les valeurs que l’on partage sont une des réponses. Et celles-ci sont trimbalées par les auteurs des Lumières. ”
Marie Normand est passionnée et convaincue. Ce metteur en scène, originaire de Mirecourt, biberonnée aux ATP Vosges (Amis du Théâtre Populaire) et formée au Théâtre du Peuple, a lancé le pari, il y a dix ans, d’apporter sa ” petite pierre à l’édifice ” avec sa compagnie.
Les objectifs reposent sur trois axes : la création et la diffusion de spectacles originaux, notamment d’autres oeuvres lors du festival mirecurtien Coup de théâtre et enfin, la médiation culturelle : ” Aller vers ceux qui, n’estiment pas forcément que le théâtre est là pour eux. “
Ce troisième pan de l’organisation est à l’origine de la nouvelle création de Rêve général ! :
Les Préjugés. ” L’idée est née lors de notre dernier spectacle Roulez Jeunesse, qui parlait de la découverte de l’amour et de la sexualité pour les adolescents. ”
Comme à l’accoutumée chez Rêve général !, les spectacles sont présentés dans des collèges, lycées et autres lieux de rencontre avec les jeunes. ” Là, nous avons remarqué deux choses. Tout d’abord, les gamins se cachent sous la table quand on parle de théâtre et encore plus quand il s’agit du registre classique “, sourit Marie Normand.
Le deuxième constat est moins anecdotique : ” Nous pensions que la nouvelle génération était plus tolérante On s’est trompé ! ” Au collège et au lycée aussi, on prend de haut les religions qui sont inconnues et on y parle communautarisme. ” On s’est dit que c’était le moment de traiter des préjugés et du vivre-ensemble. “
Et ce genre de thématique ne date pas d’hier. Déjà au XVIIIe siècle, le statut social cause des soucis à Angélique, jeune noble amoureuse d’un bourgeois, dans Le Préjugé vaincu de Marivaux. ” C’est elle, et elle seule qui se fabrique un obstacle
”
Marivaux et le XXIe siècle se retrouvent
Une histoire qui trouve résonance dans le spectacle de Rêve général !, où deux jeunes lycéens, avec des préjugés l’un sur l’autre, tombent pourtant amoureux… Il s’agit des a priori que chacun possède sur les personnes de l’autre sexe.
L’écriture de la jeune auteur Maryline Mattei dévoile une ellipse narrative : ” On attrape le spectateur pour se questionner sur ce qu’est le préjugé aujourd’hui “, ajoute Marie Normand.
Deux textes qui s’entrelacent, des acteurs qui prennent un masque différent et pourtant concordant, des décors, des costumes similaires. ” Il y a une unité “, assure le metteur en scène. Même s’il ne s’agit pas du même langage, la thématique n’a pas pris une ride.
” La plus belle récompense, c’est lorsqu’en demandant aux jeunes lycéens laquelle des deux histoires ils préfèrent, certains nous répondent celle de Marivaux. ”
Peut-être est-ce dû à leur implication dans le processus artistique : chaque répétition a eu lieu en milieu scolaire, des résidences d’écriture et de répétitions ont été effectuées dans des colonies de vacances, des lycées professionnels, des collèges…
Un travail de longue haleine de deux ans et demi et qui se clôture par une tournée d’une cinquantaine de représentations dans toute la France, à suivre sur le blog =http://lesprejuges.blogspot.fr/]www.lesprejuges.blogspot.fr
Ce n’est que le début pour cette compagnie vosgienne. Pour Marie Normand, la médiation culturelle manque toujours : ” Seuls 2 % de la population vont au théâtre dans les Vosges. C’est quand même horrible que certaines personnes n’y aillent pas parce qu’ils pensent que ce n’est pas pour eux. ”
Sur les territoires ruraux ou en banlieue parisienne, les conséquences sont les mêmes selon le metteur en scène, qui se dit ” engagée dans le sens premier de la politique : s’il n’y a pas d’engagement dans une cause, il n’y a aucun intérêt “.
Infos : =http://revegeneral.fr/]www.revegeneral.fr