Cinéma : Straight Outta Compton de Felix Gary Gray

Avec O’Shea Jackson Jr., Corey Hawkins, Jason Mitchell… 2h27. Sortie de 16 septembre.
Depuis qu’il est sorti en salles aux États-Unis, il affole les compteurs. Straight Outta Compton, odyssée musicale du groupe pionnier de gangsta rap NWA (acronyme de Niggaz Wit Attitude), affichait encore, lors de la rédaction de cet article, la première place du box-office U.S, plus de trois semaines après sa sortie, damant le pion à Mission : Impossible, avec plusieurs longueurs de recettes d’avance.
Straight Outta Compton est un uppercut. Parce qu’il raconte d’abord l’histoire d’un groupe noir américain dont le quotidien était fait de descentes de police et d’arrestations arbitraires. Parallèlement à ses qualités intrinsèques (on y revient), les résonances avec l’actualité achèvent d’en faire un film phénomène.
Compton s’impose, par les temps qui courent et par un timing malheureux, comme un nouveau film générationnel (comme pouvait l’être Boyz N The Hood en 1991) et porte-étendard d’une lutte pour l’insoumission. La question raciale traverse le film, comme le passage à tabac de Rodney King et l’acquittement des policiers qui l’ont persécuté.
Vingt et un ans séparent les émeutes de Los Angeles et de Ferguson, mais la même rage et indignation transpirent de la pellicule. Derrière la grande Histoire, il y a la petite, mythique dans le monde du rap. Biographie autorisée du groupe (et de parti pris, forcément), produite par deux de ses membres iconiques, Ice Cube et Dr Dre, Compton sonne comme une mise au point.
Durant 2h30, ce qui aurait pu passer pour un biopic lisse et fade est traversé de fulgurances : la tournée de 1988, les clashs, les diverses scissions et la genèse de titres emblématiques nés au sein ou à l’écart du groupe, de Fuck the police à Nuthin’ But A G Thang qui bénéficient de mises en scène évocatrices.
Les égarements de Dre, de Cube prennent une place tout à fait fascinante, principalement parce que les anciens combattants de NWA, à l’aune de la cinquantaine, apposent un regard lucide sur leur passé. Jusqu’à la scène finale, entièrement dédiée à Easy E, fauché par le sida en 1995, et à qui les membres du groupe (via leurs doubles acteurs, dont le propre fils d’Ice Cube qui joue son père) semblent formuler d’ultimes excuses.