Entretien avec Dr François Sarkozy qui nous donne les clés pour vieillir heureux !
Ex-pédiatre et ancien interne des Hôpitaux de Paris, François Sarkozy est aujourd’hui à la tête de FSNB Health & Care et de www.touspourlasante.tv, une plateforme digitale dédiée à la santé et à la prévention. C’est donc naturellement qu’il s’est penché sur la question de la vieillesse. Dans son ouvrage, il nous donne les clés pour préserver notre capital jeunesse et nous prouve que vieillissement et bonheur ne sont pas incompatibles… à condition de s’y prendre tôt.
François Sarkozy, que signifie “ être vieux ” ?
C’est une bonne question. Je pense que ce n’est pas une affaire d’âge, mais d’état d’esprit. Il y a tellement d’exemples. Je cite dans mon livre Jean d’Ormesson qui pétillait jusqu’à la fin de sa vie ou encore ce nonagénaire qui a couru le Marathon de Paris en sept heures et quelques. On ne peut pas dire qu’ils soient vieux. En revanche, on peut voir des personnes plus jeunes, plus sédentaires, qui n’ont pas d’envies. Je pense que c’est plus ça qui définit la vieillesse. On est vieux quand on renonce à découvrir, à apprendre, à échanger, à aimer. Ce serait ça ma définition de la vieillesse.
Certains penseraient d’emblée aux rides….
Les rides, ça a du charme. Meryl Streep a déclaré « surtout ne m’enlevez pas mes rides aux coins des yeux qui témoignent de l’émerveillement que j’ai eu devant toutes les beautés du monde ». Claude Sarraute disait : « je vous souhaite à tous d’être aussi vieux que je suis, car je me lâche complètement, je n’ai jamais autant rigolé ».
La notion d’énergie est importante. Évidemment, quand on est malade, c’est plus compliqué, mais il y a des gens avec des handicaps, des situations sociales difficiles qui sont pourtant vivants, pétillants, intéressants et intéressés par le monde qui les entoure. Je ne les trouve pas vieux.
« Les deux maux de notre siècle sont la sédentarité et la malbouffe »
François Sarkozy
Vous étiez pédiatre. Selon vous, tout se joue dès le plus jeune âge…
Oui. C’est très important. Je pense que la prévention doit commencer très tôt et que c’est une affaire individuelle. Effectivement, on n’est pas en tête de cohorte pour la prévention en France. Il ne faut donc pas attendre que la collectivité organise tout. Chacun peut faire beaucoup sur sa propre vie et il faut commencer par nos enfants.
Des choses toutes bêtes, comme les habitudes alimentaires. Un enfant qui est en surpoids a plus de chance d’être obèse, ce qui est un facteur de risque important. On a un capital soleil, si on expose les enfants sans crème, on va abîmer leur peau. Il faut aussi leur donner l’habitude de faire des exercices et de ne pas être sans arrêt devant des écrans. Les deux maux de notre siècle sont la sédentarité et la malbouffe. Aujourd’hui, on fait du vélo, mais électrique. On commande ses courses pour être livrés. On ne marche plus, on fait moins d’effort. Mais ce n’est pas ça la vie.
On a compris que ce que l’on appelle l’« épigénome » est essentiel, car il régule la façon dont sont synthétisées les grosses molécules d’ADN à l’origine des protéines et des enzymes qui font que nos tissus et nos organes fonctionnent. L’épigénome (qui représente 80 % des génomes) a besoin d’être mis sous tension. Si on ne fait pas une activité physique (sans parler de sport forcément) quotidienne, il va « s’endormir ». Donc oui, il faut commencer tôt à donner de bonnes habitudes aux enfants et adapter la prévention à chaque âge de la vie et à chaque personnalité.
Mais alors à 40, 50 ou 60 ans, est-ce trop tard ?
Non, il n’est jamais trop tard pour bien faire. Ariel Cohen, ancien président de la Société Française de Cardiologie, m’expliquait que, même si certaines personnes en surpoids ont du mal à faire de l’exercice, cela permet de diminuer la graisse dite « brune » et les risques cardiovasculaires. Il ne faut pas se décourager. Au départ, on a des courbatures, ce qui signifie que ça marche. Après, c’est plus facile, on perd un peu de poids, on a meilleure allure, les gens vous le disent et on est mieux dans sa tête. On rentre ensuite dans un cercle vertueux. Effectivement ça va dépendre de l’âge et des conditions physiques. Mais quand on est plus âgé (après 70 ans), ce qui compte, c’est de ne pas perdre de masse musculaire. Il faut sortir, marcher, faire du vélo. Il y a beaucoup de choses à faire et à tous les âges. Tout est possible.
Il y a l’activité physique, mais aussi l’alimentation…
Il est important de manger équilibré. Les bénéfices du régime méditerranéen ne sont plus à prouver. On évite les aliments industriels, les aliments gras, la charcuterie… on limite la viande rouge qui peut être liée à certains cancers. On privilégie le poisson, les légumes de saison ainsi que les amandes ou les noix de cajou. Il faut boire beaucoup d’eau, c’est très important. Le jeune intermittent a aussi fait ses preuves. Tout est une question d’équilibre.
Vous évoquez les bienfaits de la caféine sur la maladie d’Alzheimer. Un traitement est déjà disponible aux États-Unis. Qu’en est-il en France ?
Ce médicament devrait arriver chez nous prochainement. Il faut préciser qu’il va concerner les Alzheimer débutants. Ce qui est intéressant, c’est que l’on sait que certains facteurs – encore ces « usual suspects » : tabac, surpoids, diabète, etc. – sont impliqués. Puis, nous avons les facteurs de risque comme l’âge, le fait d’être une femme, ou une certaine mutation génétique qui favorisent la maladie. Il y a aussi d’autres éléments à prendre en compte, l’éducation, la stimulation, l’interaction sociale, le travail…
Le travail, c’est la santé ?
Oui, mais parfois, il faut aménager les conditions de travail. Des études ont montré que les gens qui travaillent plus longtemps vivent plus longtemps et mieux. Mon ami Olivier de Ladoucette, président de la Fondation d’Alzheimer, me disait : « un an de travail en plus, c’est un mois d’Alzheimer en moins ». Je ne dis pas que cela permet de tout éviter, mais il y a ce lien fort. Ce qui me choque davantage, c’est la discrimination contre « les vieux ».
D’abord, on les fait partir en pré-retraite, ce qui est une perte d’expertise très importante pour les entreprises. Ensuite, très souvent, on met les personnes âgées en périphérie des villes, ce qui est une hérésie, car elles ont besoin d’être au cœur des villes pour tout avoir à proximité. Puis il n’y a plus le lien transgénérationnel. On a l’impression que les seniors ne sont plus utiles. Pourtant, ils ont une utilité, sociale, notamment envers les plus jeunes. N’oublions pas que ce sont des consommateurs qui payent leurs impôts.
« Il faut se protéger de tout ce qui est toxique. »
Il y a aussi la peur de la maladie…
Oui, car la santé est un équilibre fragile. On pourrait parler de la grippe qui peut entraîner des complications cardiovasculaires. Ce qu’il faut, c’est se protéger contre toutes les pathologies. (…) On attend que les symptômes de la maladie soient là. Pourtant, il n’est jamais trop tard grâce à la médecine qui a fait beaucoup de progrès, mais il vaut mieux prévenir que guérir. Par exemple, la fonction rénale est essentielle, je dis aux jeunes qui prennent des protéines « faites attention pour le futur ». Encore une fois, c’est question de bon sens. Si l’on a un doute, il suffit d’en parler à son médecin ou à son pharmacien et de faire des bilans réguliers.
« Regretter moins, espérer moins et aimer plus. »
En clair, il faut se protéger de tout ce qui est toxique, le tabac, trop d’alcool, les environnements toxiques – on pourrait dire certaines relations toxiques même (rires) mais c’est autre chose. Ne pas oublier non plus la notion de plaisir. Accepter qui on est. S’élever, ça peut être spirituellement. Donner un sens à sa vie. On en revient à la question du début, avoir l’envie.
L’envie, la base de la philosophie du bien vieillir…
Quand on est jeune, on veut tout. Avec l’âge, on prend du recul, on sait hiérarchiser les choses. C’est pour cela que je parle dans mon livre de la notion de « présent », de carpediem. Alors, on a tendance aussi à regarder en arrière : je suis moins beau, j’ai moins de responsabilités, j’ai plus de rides. On fait le bilan. Mais ce n’est pas la bonne chose à faire. En revanche, l’acceptation de soi est essentielle : « Je suis comme je suis ». Et du coup ça marche. Luc Ferry résume bien cela. Il dit que finalement, il faut être moins dans le passé, moins dans le futur, plus dans le présent. C’est-à-dire regretter moins, espérer moins et aimer plus. En tout cas, je me sens mieux dans ma peau après 60 ans qu’à 20 ans.
Vieillir heureux, c’est possible.
Les clés pour vivre mieux et Longtemps
Dr François Sarkozy
Éditions Leduc
Septembre 2023 – 19,90 €
Disponible à la FNAC