Le Mudaac d’Épinal prépare sa métamorphose !
Dans un mois, le Musée départemental d’art ancien et contemporain, à Épinal, fermera ses portes pour de lourds travaux qui vont durer deux ans. Si l’objectif premier est de permettre de mieux préserver les œuvres, le chantier sera l’occasion de transformer le parcours visiteurs. Suivez le guide.
Le 1er octobre au soir, le MUDAAC fermera boutique pour deux ans. L’instant est rare, presque unique dans la vie d’un musée. Pour le Musée départemental, qui n’a pas connu de travaux d’envergure depuis 1992, l’opération devenait nécessaire. « Les normes de conservation des collections n’étaient pas les mêmes qu’aujourd’hui. Nous sommes très attentifs à la conservation préventive, pour éviter de potentielles dégradations » explique Thierry Dechezleprêtre, conservateur du patrimoine, responsable de la conservation départementale des Vosges.
Température trop élevée, air trop sec ou humidité excessive… les meilleurs ennemis des œuvres sont connus. À long terme, les matériaux organiques – bois, peinture ou textiles, ou la polychromie qui recouvre la pierre et qui constituent les œuvres – n’y résistent pas. Pour protéger les trésors du musée de variations inévitables, il faut donc revoir l’enveloppe qui les abrite. À l’intérieur, le traitement de l’air, assuré par des machines vieillissantes, fera l’objet d’une attention particulière, afin d’être surveillé comme le lait sur le feu par des mécaniques dernier cri.
L’extérieur du musée et ses abords ne seront pas en reste, là où les travaux ont déjà commencé, au milieu des allées et venues des visiteurs. Un aménagement particulier sera également apporté aux abords de la Moselle avec des terrasses en bois pour permettre aux visiteurs de profiter du cadre d’implantation du musée. Combien peuvent se targuer de se trouver au bout d’une presqu’île, avec vue sur les premiers contreforts des Vosges ?
La rue a été entièrement reconfigurée pour permettre une meilleure circulation des piétons, et le versant paysager des travaux débute ces jours-ci avec pour mot d’ordre la végétalisation de l’esplanade du musée. Un parcours piéton a été pensé pour favoriser la déambulation et attiser la curiosité des promeneurs et visiteurs potentiels, avant qu’ils ne poussent la porte de l’endroit. De nouvelles œuvres rejoindront la sculpture de Barry Flanagan, pièce totémique du musée… laquelle servira de porte d’entrée vers l’après.
Si l’instant est unique, il l’est aussi parce qu’il pousse les équipes à réinventer les lieux. Une fois les travaux de remise aux normes et d’apparat réalisés, des chantiers muséographiques prendront le relais. Le parcours autour des Vosges à l’époque gallo-romaine ainsi que les salles de peintures anciennes, repensés en 2014 et 2017, ne seront modifiés que légèrement. En revanche, certains espaces n’ont jamais été remodelés depuis 1992.
« Ils seront modernisés » appuie Thierry Dechezleprêtre. Au rez-de-chaussée, l’espace consacré à la Renaissance et au Moyen Âge sera concerné au premier chef. Au premier étage, les collections consacrées aux arts décoratifs, à l’ethnologie et une partie de l’inventaire côté beaux-arts pourront être observées sous un nouveau jour. Au dernier étage, tout l’art contemporain bénéficiera d’un nouvel écrin pour répondre aux nouvelles attentes des visiteurs, y compris en termes d’accessibilité, avec des parcours adaptés, notamment aux handicaps visuels et auditifs. « Nous voulons nous ouvrir encore plus vers l’extérieur » résume le conservateur. « Il faut que le musée puisse s’adresser à l’ensemble de la société ».
Toutes les équipes du MUDAAC seront mobilisées durant cette longue période. Au sortir de sa chrysalide, le musée a déjà prévu la suite : une exposition autour de la collection des princes de Salm, qui comprend notamment les œuvres de Rembrandt, Laurent de La Hyre, Jan van Goyen et Salvator Rosa. Le noyau originel du Musée départemental, par quoi tout va recommencer.
Un bouquet final avant la fermeture
Avant de fermer boutique, le musée compte bien mettre le paquet sur la programmation. On commence avec la dernière visite « Un autre regard » organisée le dimanche 3 septembre. Suivront les Journées européennes du patrimoine, les 16 et 17 septembre prochains, où des figures connues du musée referont une apparition, comme la compagnie « Les 2 de la Spontanée », avec ses visites clownesques.
Plus tard dans le mois (le 24), le chorégraphe Amon Bey reviendra également s’illustrer avec une performance dansée. Aux Journées du patrimoine, les artistes plasticiens seront à leur tour mis à contribution pour inviter les visiteurs à des expériences de redécouverte des œuvres par le prisme des sens. « C’est quelque chose que nous souhaiterions développer dans les prochaines années » confie Aurélie Debrosse, responsable du service des publics.
« Les œuvres vivent différemment ». La compagnie spinalienne Ultreia fera de même à l’occasion d’une résidence organisée la dernière semaine de septembre. Elle proposera une création spécialement conçue pour le MUDAAC, promise à restitution le dernier jour avant la fermeture. Baptisée Morphose, elle revisitera des œuvres du parcours beaux-arts du musée sur lesquelles seront projetés des images et du texte… en commençant par l’un de ses représentants les plus célèbres, le tableau Job raillé par sa femme de Georges de la Tour. Une vingtaine d’œuvres est concernée par la performance, qui sera jouée quatre fois (le 1er octobre à 14 h, 15 h, 16 h et 17 h) avant extinction des feux.
Même en travaux, le MUDAAC s’anime encore
Au MUDAAC, fermeture ne veut pas dire inactivité, bien au contraire. « La fermeture peut paraître longue. Tout l’enjeu est de garder le lien avec les visiteurs » précise Aurélie Debrosse. « Nous sommes en train de réfléchir aux actions hors les murs, nous souhaitons exploiter au maximum ce potentiel… ». Y compris en ligne, comme cela avait déjà été fait pendant la Covid. « L’idée, c’est que le MUDAAC sorte de son lieu d’origine pour aller explorer d’autres horizons ». Par ailleurs, et pendant toute la durée du chantier, le musée exposera ses transformations, via ses réseaux sociaux. Restez connectés !
Musée départemental d’art ancien et contemporain (Mudaac)
1 place Lagarde à Épinal
Tél. 03 29 82 20 33
mudaac.vosges.fr
Que deviendront les œuvres pendant les travaux ?
Le 2 octobre au matin, les équipes entreprendront de démonter les collections. Une entreprise longue et délicate qui va nécessiter de retirer quelque 1 300 objets des salles, de les dépoussiérer et d’en faire l’inventaire par le menu.Certaines œuvres seront restaurées en cas de nécessité.
La plupart vont rejoindre les réserves du musée, quand d’autres feront l’objet de conventions de prêts dans d’autres structures muséales. Certaines, réputées encombrantes, comme Le cavalier à l’anguipède, qui trône dans l’atrium du Mudaac, seront protégées, voire coffrées, à défaut de pouvoir être déplacées.
« Tout ce travail de fond nous permettra d’avoir une meilleure connaissance des collections » indique le responsable de la conservation départementale des Vosges. Il réservera peut-être même quelques surprises aux équipes qui pourraient, qui sait, débusquer quelques trésors cachés ?
Le Calendrier des travaux
- Du 1er octobre 2023 à février 2024 : chantier des collections. Les œuvres seront démontées, protégées et inventoriées, avant d’être mises en réserve.
- Mars 2024 jusqu’à la fin du semestre : début des travaux de traitement de l’air, qui nécessiteront, dans certains cas, de démonter les plafonds.
- Second semestre 2024 : travaux sur la verrière centrale, mais aussi sur les verrières ouest et est.
- 2025 : Intervention sur la muséographie, le parcours visiteurs et l’accessibilité, avant de réinstaller les collections, tâche qui prendra encore plusieurs mois.
- Début 2026 : horizon envisagé pour la réouverture du Mudaac.
