Profession : vérificateur d’attractions foraines

La fête foraine de la Saint-Maurice se déroule au Petit Champ de Mars à Epinal jusqu’au 19 octobre. Rencontre avec le Vosgien Laurent Dehaffreingue, un des rares professionnels en France à exercer le métier de vérificateur d’attractions foraines.
” La confiance et les compétences doivent être réciproques. ” Depuis onze ans, Laurent Dehaffreingue exerce un métier rare, celui de vérificateur d’attractions foraines. La France compte seulement une dizaine de bureaux agréés de cette nature. Cet ex-commercial dans l’automobile vient de parcourir en une décennie 1,2 million de kilomètres. Dans le Grand Est principalement, mais aussi la région parisienne et le sud du pays pour contrôler la conformité des équipements permettant le fonctionnement des manèges et autres stands et attractions. ” De la pêche à la ligne au Booster Max, en passant par les stands de tir, trampolines “, rien ne doit échapper à sa perspicacité.
Il suffit de jeter un oeil sur un procès verbal de contrôle pour mesurer la rigueur de la tâche : calage, ossature et mécanisme, guidage, rails et pistes, poste de commande, système de freinage, avertisseur de départ, entre autres rien n’est laissé au hasard. ” En fait, c’est un véritable partenariat “, explique Laurent Dehaffreingue.
Contrôle systématique tout au long de l’année
” Quand je signe le certificat de conformité, j’ai autant confiance dans le matériel que dans l’exploitant “. ” Si j’interviens tous les trois ans, voire chaque année sur les gros “métiers”, les forains n’attendent pas ma venue. Le contrôle est systématique tout au long de l’année, avec notamment des examens avant chaque ouverture, un cahier de maintenance étant tenu à jour, où sont consignées toutes les tâches d’entretien et de contrôle. “
Dans ce job hors norme, l’entrepreneur vosgien il est né à Epinal et vit au Thillot engage sa responsabilité civile et pénale. Autant dire qu’ ” il y a une obligation de résultats “. Et d’insister à ce sujet sur ” le grand professionnalisme des forains “. ” Mes clients vont souvent au-delà de ce qu’ils ont à faire en matière de sécurité, anticipant les normes. Ils sont très attentifs à cela. Pas question, pour eux, de prendre le moindre risque. Etre forain, c’est distribuer du bonheur, des sourires d’enfant “. Aux derniers mots, le regard s’allume. On l’a compris, aussi technique soit son métier, réclamant des compétences en électricité, mécanique, hydraulique , Laurent Dehaffreingue le vit aussi sous un autre jour.
Forain : un métier en voie de disparition
” On devient vérificateur par passion “, glisse-t-il, se remémorant les ” souvenirs d’enfance à la Fête Saint-Maurice d’Epinal, cette ville qu’il aime “. ” Ce métier offre beaucoup, même s’il demande des sacrifices, la vie de famille notamment. C’est un enrichissement personnel, une grande liberté aussi. Je suis en quelque sorte un voyageur parmi les voyageurs “. ” J’ai adapté ce style de vie “. Nouvelle lumière dans le regard. Cette fois, Laurent Dehaffreingue parle : des hommes, des forains, de la fête. ” C’est l’un des derniers endroits où il y a une réalité des sentiments, où je trouve des valeurs qui manquent dans la société d’aujourd’hui : l’entraide, la tolérance, l’humanisme. Je m’y retrouve fondamentalement. “
Ces liens forts qu’a su tisser Laurent Dehaffreingue le poussent à vivre les problématiques – coûts d’entretien, de transports, d’installation d’une profession dont ” les pouvoirs publics ne font aucun cas”, mais qui ” ne se plaint pas “. ” Ici à Epinal, c’est magnifique, grâce au maintien de la fête foraine au coeur de la ville. C’est vital. Les en expulser, comme le veut la tendance actuelle, c’est les crucifier, les exécuter “. ” J’ai de plus en plus de clients qui n’hésitent pas à dire à leurs enfants d’envisager un autre métier. C’est un drame, car c’est un pan de l’histoire qui s’en va. ” Et Laurent Dehaffreingue de conclure : ” J’aimerais pouvoir faire bouger les lignes “, non sans sourire à l’idée que ” du 27 septembre au 19 octobre, la fête ira au devant du public et s’invite dans la ville “. Que du bonheur !
Attention aux consignes de sécurité !
Parler de sécurité, c’est évoquer bien sûr les accidents de manèges, tel celui de juin dernier à Orléans qui avait blessé gravement deux jeunes filles. ” 95% d’entre eux sont dus au non respect des consignes de sécurité, du fait de la turbulence des enfants, voire du manque de surveillance des parents “, commente Laurent Dehaffreingue qui voit dans les manèges ” le moyen de transport le plus sûr ” aujourd’hui, en sachant que bon an mal an les fêtes foraines brassent l’équivalent (voire plus) de la population française : environ 70 millions de personnes.