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Pâtissier : une profession en recherche de souffle

Le 10 septembre 2014 par Bruno Veillon

Pas assez d’apprentis, qualité des produits à relever : la profession des pâtissiers se trouve face à des problèmes. Le Vosgien Pascal Cunin, président des experts pâtissiers de Lorraine, nous révèle ses inquiétudes et sa foi en l’avenir.

Son goût préféré c’est le sucré, mais en ce moment Pascal Cunin l’a un peu amer. Le président de la Fédération Lorraine des artisans pâtissiers, l’une des plus actives de France, est inquiet. Comment ne pas s’en faire quand de moins en moins de jeunes se tournent vers le métier de pâtissier ? Quand les ouvertures de pâtisseries se font rares ?

Mais surtout, ce qu’il redoute le plus, c’est la lente uniformisation d’un métier par l’effet néfaste des produits surgelés utilisés par des professionnels moins scrupuleux. Il y a quelques semaines, avec plusieurs collègues, Pascal Cunin a demandé un rendez-vous au député-maire d’Épinal, Michel Heinrich : ” Nous lui avons exposé nos craintes vis à vis des professionnels qui utilisent des produits surgelés. Aujourd’hui seuls 20 % des artisans réalisent eux-mêmes leurs viennoiseries. Nous demandons donc la mise en place d’une appellation ” Fait maison ” pour les pâtissiers, à l’instar de ce qui se met en place pour la restauration. ” 

500 salariés hautement qualifiés

Pour les pâtissiers, il faut un changement radical : ” Depuis une vingtaine d’années, nous recevons des catalogues de 500 pages qui proviennent d’industries du surgelé, on y trouve tout, même des chocolats pralinés congelés. ” Même les contrôles de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes n’y suffisent plus. Pascal Cunin et la Fédération lorraine espèrent donc convaincre les pouvoirs publiques de changer ces pratiques discréditées, avec tout le poids d’un secteur qui représente 500 salariés hautement qualifiés au plan régional.

L’autre point noir que Pascal Cunin voudrait voir sauter, ce sont les freins autour de l’apprentissage : ” C’est un mode de formation encore très discrédité, alors même que 70 % des apprentis trouvent un emploi à la fin de leur apprentissage ! ” La prime à l’apprentissage versée par la Région vient d’être réduite de 2 500 euros à 1 000 euros par apprenti. Pas de quoi franchement encourager les entrepreneurs à recruter de nouvelles recrues. ” On se bat pour attirer les plus jeunes. On vient seulement de nous ouvrir les portes des collèges, avant il nous était interdit de venir y parler de notre métier “, constate le pâtissier.

Un dynamisme envié à Paris

Pour remédier à toutes ces difficultés, la Fédération a décidé de prendre le taureau par les cornes, et de révolutionner son image. ” Communiquer n’est pas notre métier, alors depuis l’été 2013, nous avons recours à une professionnelle pour améliorer nos communications sur les réseaux sociaux, internet et dans les médias. On a maintenant toutes sortes d’opérations pour parler de nous : la galette des rois, la Saint-Valentin, la fête des mères, la mirabelle en septembre, la bûche en fin d’année… On veut aussi redynamiser la Saint-Nicolas. Nous avons également réalisé un film de promotion. Mais surtout, nous sommes désormais ” les experts pâtissiers de Lorraine “, une marque que nous portons avec fierté ! ” 

Un dynamisme envié par d’autres : ” Nous sommes la première fédération nationale à réaliser des opérations et à se fédérer autant. À Paris, ils ne sont que 20 pâtissiers dans leur fédération, nous sommes 70 rien que pour la Lorraine ! Tant que nous sommes mobilisés, ça marchera “, conclut le président des pâtissiers lorrains.

Les pâtissiers peuvent aussi compter sur une amélioration notable des conditions d’exercice de leur profession : de nouvelles méthodes de fabrication qui permettent de travailler plus vite et de bénéficier d’horaires plus convenables, des salaires entre 1 500 et 2 500 euros nets, la féminisation de la profession qui a apporté une nouvelle créativité. De quoi inciter davantage de jeunes à embrasser ce vieux métier. Justement, un nouveau genre d’apprenti plus âgé toque aux portes des pâtisseries : déjà bachelier, ils ont parfois plusieurs années d’études scientifiques ou littéraires dans la besace, ou carrément eu une autre vie professionnelle auparavant. Un nouveau souffle pour une profession qui en a bien besoin.

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