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Comment anticiper la transmission familiale de son entreprise ?

Le 16 septembre 2024 par Francoise Fontanelle
Directeur associé YZICO et responsable de site.
© YZICO

Transmettre son entreprise à un membre de sa famille est une étape cruciale pour les dirigeants qui souhaitent passer le relais. Quels sont les risques et les enjeux ? Les réponses de d’Emmanuel Pavot, associé Yzico.

Comment faut-il, idéalement, aborder un projet de transmission familiale ?

Les premières questions qu’il faut se poser sont : à qui je donne, comment je vais donner, est-ce que je vends, est-ce que je donne à mes enfants, est-ce que je privilégie tel enfant ou tel autre, par exemple. Transmettre son entreprise à un membre de sa famille s’anticipe et s’organise quatre à cinq ans avant la cession effective. Ce délai permet de préparer ses proches, d’expliquer sa décision et de les protéger.

Quels risques prend-on si l’on n’anticipe pas sa transmission ?

Dans le cas d’une société, le règlement de fonctionnement et les statuts d’entreprise, la décision de savoir qui, demain, sera le dirigeant est déjà prise. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une entreprise individuelle rien n’est décidé, aussi le fait d’anticiper l’avenir et de faire part de sa décision de transmettre l’entreprise à sa famille, ou de prendre des mesures pour nommer un directeur intérimaire, est particulièrement important. Si jamais le dirigeant de l’entreprise individuelle vient à disparaître, sa famille pourra s’appuyer sur son choix et gérer sereinement la succession.

D’autre part, sans organisation en amont, le chef d’entreprise va subir la transmission et sera contraint d’appliquer brutalement les textes en vigueur : droit civil, droit fiscal et droit des sociétés. Dans ce cas, l’impact sera non seulement social, fiscal, mais également psychologique pour le chef d’entreprise et sa famille.

Quelle différence lorsque l’entreprise est cédée à une personne extérieure à la famille ?

Si l’entreprise est rachetée par un entrepreneur, ce ne seront plus des actions qui seront transmises à la famille mais un capital. Et là aussi, les questions fiscales doivent être anticipées.

Comment est déterminée la valeur de l’entreprise dans le cadre d’une transmission familiale ?

L’approche du prix se fait par un diagnostic des moyens de l’entreprise (technique, humain, financier), par l’identification les zones de risques qui lui sont propres, la prise en compte de son endettement, et la mise en phase de sa valeur avec son antériorité et ses possibilités d’évolution. Si le dirigeant décide de sortir à terme de son entreprise, il faut aussi qu’il soit organisé personnellement pour savoir ce qu’il va faire des fonds qu’il va recevoir, une question qui concerne également son notaire. Car anticiper la rédaction de son testament, organiser des donations, définir le statut d’enfants nés hors mariage, et la souscription du pacte Du Treil (qui permet une exonération partielle des droits de donation ou de succession) ou à d’autres régimes d’exonération des plus-values vont conditionner le barème des droits de succession. Par exemple, si l’on part du principe qu’une entreprise vaut un million d’euros, le chef d’entreprise n’en retirera pas un million d’euros. Sans anticipation, le droit s’applique et la transmission va être soumise aux barèmes, à savoir 17,2 % de prélèvements sociaux et, à minima à, 15 % d’impôts sur le revenu.

Anticiper, c’est aussi prévoir la nomination d’un mandataire à titre posthume, qui assurera, en cas de décès, la conduite de l’entreprise jusqu’à ce que la succession soit effective.

Quel est le rôle de l’expert-comptable ?

Le notaire est une personne importante, en tant que gestionnaire des droits de la famille (transmission et héritage), au même titre que l’expert-comptable pour la partie entrepreneuriale.

Accompagner une transmission familiale demande donc de coanimer ces deux parties. L’expert-comptable va devoir agir comme un maître d’œuvre et coordonner l’intervention du notaire, du banquier et de l’assureur de l’entreprise et donner les priorités en fonction des souhaits et des objectifs de notre client, le chef d’entreprise.

Ensemble, nous allons établir un calendrier et le nombre d’étapes en fonction des objectifs du dirigeant (transmettre dans 10 ans, ou revendre dans 5 ans, par exemple).

Départ à la retraite, envie de changer de vie,
la transmission d’entreprise ne se décide pas
sur un coup de tête. ©Adobe Stock

Quelles sont les aides fiscales qui permettent de faciliter la transmission ?

Si l’on veut privilégier ses enfants, le pacte du Treil est un véritable outil qui, s’il est mis en place suffisamment tôt, permet de faire des donations en bénéficiant d’exonérations de droits de successions très importants. Avec ce dispositif, les droits seront calculés après un abattement de 75 %, réduisant l’assiette fiscale de 1 million, pour reprendre notre exemple, à 250 000 euros.

Une autre solution que l’on peut prendre en amont, consiste à externaliser l’immobilier d’entreprise s’il y en a un (qui va continuer à prendre de la valeur) et de vendre l’activité dans un premier temps ; d’assurer le passif social de l’entreprise pour pérenniser le savoir-faire de l’entreprise.

L’expert-comptable doit donc envisager tous les scénarios… Même ceux qui dépassent les questions sociales, économiques et juridiques ?

Le rôle de l’expert-comptable, au travers des éclairages qu’il apporte, consiste à mettre le dirigeant et sa famille en éveil, sans affect, sur tous les risques possibles liés à la façon dont il va transmettre l’entreprise et organiser sa succession. Il est aussi de lui donner tous les arguments pour qu’il puisse prendre sa décision, informer sa famille et expliquer son choix.

Par exemple, il ne faut pas imaginer que son fils ou sa fille sera le repreneur naturel de l’entreprise, sans en avoir l’accord et l’assurance, au risque de subir une désillusion. Le jour de l’évaluation, nous expliquons aux proches du dirigeant que, si l’entreprise fait l’objet d’une transmission familiale, celle-ci peut être cédée à un prix aménagé qui engage l’équité par rapport aux autres enfants.

Autre exemple. Imaginons qu’un enfant de la famille reprend l’entreprise et que, de son côté, un autre enfant reçoit un million d’euros en héritage. Si deux ans plus tard l’entreprise fait faillite, le deuxième enfant a toujours son million, le premier n’a plus rien.

Il faut également conseiller le chef d’entreprise à envisager l’après transmission qui peut se produire avant l’âge légal de départ à la retraite, et avoir pour conséquence une chute de revenus qu’il n’aura peut-être pas anticipée. Là aussi, l’expert-comptable peut lui proposer des solutions très techniques, comme démembrer une partie de ses titres de société, donner la nue-propriété, qui vont lui permettre, s’il anticipe, de conserver des revenus sans se dessaisir de la propriété.

« Le rôle de l’expert-comptable, au travers de ces éclairages, consiste à mettre le dirigeant et sa famille en éveil, sans affect, sur tous les risques possibles liés à la façon dont il va transmettre l’entreprise et organiser sa succession. »

www.yzico.fr

Un article réalisé en partenariat avec le Magazine Tandem, à consulter ICI .

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