Nian, nian, nian* : le patois vosgien n’est pas mort !

Les patois vosgiens ne sont pas morts. D’actifs veilleurs les font (re)vivre. Témoin, l’édition en cours du Petit Nicolas de Goscinny traduite, comme le fut hier L’éffère Tournesol.
* Non, non, non…
” C’est le langage de nos ancêtres, on essaie de le sauver ! ” La réponse de Del Daval est nette. Le(s) patois vosgien(s) doivent vivre. Le retraité actif s’y emploie, du côté du Val d’Ajol, avec la trentaine de membres de l’association Lâ Patoisant dâ tro R’vères qu’il préside. Depuis les années 1990, ils sont ainsi à l’origine de traductions qui font date. Un lexique d’abord, fruit de longues soirées d’échanges et riche de centaines de mots, principalement liés à la vie paysanne d’autrefois. Puis vient, en 2008, le succès avec L’Effère Tournesol d’Hergé et ses 5 000 exemplaires dont 3 000 numérotés, ayant séduit les collectionneurs jusqu’aux États-Unis, la Guyane, et la… Chine.
D’autres ouvrages, plus modestes, mais tout aussi emblématiques ont suivi : Histoires de régiment sur la correspondance authentique de militaires des Poilus de 14-18, Nonon Popol l’histoire d’un facteur ou encore un recueil d’histoires drôles. Place aujourd’hui au fameux Petit Nicolas (Sempé -Goscinny) traduit en trois patois : Girmont Val d’Ajol Le Val d’Ajol et Plombières-les-Bains, Xertigny et ses alentours, et la Voye (de Fresse à Bussang ).
Une centaine d’ouvrages
était déjà vendus
” Les patois sont à peu près les mêmes dans toutes les vallées, précise Del Daval, mais ils ne s’épellent pas pareil “. Sous le titre Lé P’tit Côlas en caûseries dâ Vosges, l’ouvrage de 144 pages à paraître aux éditions Imay, tiré à 650 exemplaires et d’ores et déjà en souscription, sortira en librairie à l’occasion de la Saint-Nicolas. Une centaine d’ouvrages était déjà vendus à la fin mai, un signe prometteur pour ce nouveau fleuron patoisant vosgien.
” Un patois possède la même structure que n’importe quelle langue : il y a un vocabulaire, né dans les Vosges de différents apports latin et langues germaniques principalement – une phonétique, une grammaire, une conjugaison “, explique volontiers Alain Litaize, l’un des universitaires qui, avec Jean Lahner, s’impose comme un spécialiste de la dialectologie en Lorraine.
” Ce qui manque, ce sont les jeunes “
Outre leur collaboration active à l’édition d’ouvrages, et à l’instar d’autres passionnés oeuvrant à Xertigny, Gérardmer… les patoisants ajolais et plombinois le vérifient dans des rendez-vous aussi studieux que festifs. Pour preuve, les colloques annuels, organisés l’an dernier au Val d’Ajol sur le thème ” Les métiers d’antan “, le 26 septembre prochain à Fréland (68) sur ” La vie religieuse “.
Ou encore la traditionnelle messe au Girmont Val d’Ajol traduite en patois, et sous-titré sur grand écran en… français. Ce sera le 4 octobre prochain. ” On remplit presque l’église “, glisse Del Daval, non sans évoquer l’apéritif d’après cérémonie, et de conclure : ” Ce qui manque, ce sont les jeunes “. Avis aux amateurs désireux de (re)découvrir leurs racines.
Lexique local
Arsouille : personnage grossier et malpropre
Beûquillon : bûcheron
Da Deil : au-revoir
Ecoi vôs : bonjour
Efousné : excité, énervé
Esbaudi : surpris
Grâs dé jambe : mollet
Kih lé : éclater de rire
Neuye : nuit
Nonon : oncle
Merci brôment : merci beaucoup